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SÉCURITÉ ROUTIÈRE: TOUS LES MOYENS SONT BONS (MAI 2008)
Pour 2010, la Commission européenne entend réduire de moitié le nombre de morts sur les routes par rapport à 2000. La date fatidique presque en vue, il reste du pain sur la planche. Les débats sont animés : quelle orientation faut-il privilégier ? La sécurité active ou passive, un habitacle rigide pour protéger les occupants, un pare-chocs souple pour éviter de blesser les piétons en cas d’accrochage ? Ou faut-il se pencher sur la sûreté des infrastructures, maintenant que toutes les nouvelles voitures résistent bien au crash test ? Les discussions sont loin d’être épuisées, car les avis divergent fortement. Résumons.
L’insécurité routière recule trop lentement
La baisse du nombre d’accidents mortels n’est pas assez
rapide dans l’Union européenne. Chaque jour, environ
115 personnes perdent la vie sur les routes d’Europe. En
2006, on dénombrait quelque 39 200 décès par accident
de la route dans l’UE. Par rapport à l’année de référence
2000 (50 000 morts ou 137 par jour), c’est beaucoup
mieux, mais les progrès sont insuffisants pour descendre
sous la barre des 25 000 en 2010. Au rythme actuel, il
restera 32 500 morts par an en 2010, et il faudra trois
ans de plus pour atteindre l’objectif. L’intensification des
transports et l’accession à l’Union de pays où la sécurité
routière est défaillante ne font que rendre le défi plus
difficile.
Ce sont surtout les Européens de l’Est et les jeunes hommes
qui conduisent dangereusement, révèlent les statistiques
de la Commission européenne. En Europe de l’Est,
deux automobilistes sur trois ne portent pas la ceinture
de sécurité. L’alcool au volant y est aussi plus répandu
qu’en Europe de l’Ouest. Les hommes de 18 à 23 ans
sont surreprésentés dans les chiffres d’accidents, en particulier
le samedi soir. Mais les plus vulnérables sont les
conducteurs de deux-roues et les piétons : en 2010, un
mort sur trois conduisait une moto. L’objectif de la CE
compte naturellement une série de facettes. Nous nous
limiterons ici aux voitures de tourisme et aux piétons.
Sécurité des occupants
Grâce à l’évolution constante des technologies de sécurité,
les constructeurs automobiles sont parvenus à améliorer
structurellement la sécurité en cas de collision. Plus
de 90 pour cent des voitures de tourisme testées en 2006 par le centre d’essai EuroNCAP se classent dans les deux
catégories les plus sûres. Il y a dix ans, un tel résultat était
encore inimaginable. Et parmi ces voitures, près d’un
tiers obtiennent la note maximale de cinq étoiles. À titre
de comparaison, sur les modèles testés par EuroNCAP en
2000, aucun n’obtenait cinq étoiles, et moins de la moitié
en emportait quatre. Avec chaque étoile en plus, les
risques de blessures graves ou mortelles reculent de 12
pour cent, explique-t-on au centre d’essai européen.
Nombre de constructeurs estiment d’ailleurs que la
protection physique des occupants a aujourd’hui atteint
ses limites ou presque. Davantage d’airbags, de meilleures
zones de froissement, des habitacles plus rigides:
ces mesures ne sont plus considérées comme
essentielles pour réduire le nombre de victimes de la
route. Désormais, l’accent est mis sur la sécurité active.
Certaines marques s’attachent à prévenir les collisions
(graves) à l’aide d’ordinateurs de bord intelligents et de
systèmes de détection qui maintiennent automatiquement
une distance suffisante entre les voitures. Ces dispositifs
intelligents sont en plein développement. Dans
les années qui viennent, on en trouvera dans tous les
segments du marché.
Protection des piétons
L’étude de faisabilité de la Commission européenne
concernant la protection des piétons (mi-2005) montrait
déjà que les résultats escomptés pour la phase 2 de la
résolution n’étaient pas techniquement réalisables. Aussi
la CE proposait-elle d’équiper obligatoirement toutes les
voitures, à partir de 2009, d’un système d’assistance au
freinage (BAS - Brake Assist System). Les deux mesures
– révision des exigences techniques de la directive
2003/102/CE et assistance au freinage – apportent une protection bien supérieure au dispositif initialement
prévu (116%). De plus, le système renforce la sécurité
dans son ensemble. Il ne protège pas seulement l’usager
le plus vulnérable, mais aussi les autres, notamment les
occupants du véhicule eux-mêmes.
L’étude de faisabilité de la CE souligne par ailleurs la
nécessité d’étudier des systèmes capables de prévenir
les accidents en général, et en première instance les collisions
avec des piétons.
Amélioration constante
Atténuer l’impact d’un accident, par exemple grâce
aux airbags latéraux, constituait un premier pas dans
la prévention des lésions corporelles. Ensuite, avec les
systèmes ABS et ESC, on s’est penché sur le comportement
du véhicule dans les instants qui précèdent un
accident potentiel. Là aussi, les progrès sont tels que le
moment est venu de passer à l’étape suivante : aider le
conducteur à éviter une situation critique avant que
l’adrénaline ne le pousse à des actes inconsidérés.
Actuellement, des dispositions légales limitent encore
la possibilité pour les véhicules de prendre des décisions
autonomes et de modifier leur trajectoire. En
attendant, les constructeurs travaillent déjà dans ce
sens. Depuis fin 2007, on trouve des voitures équipées
d’un système appelé Collision warning with Auto
Brakesystem (CWAB), une évolution de l’assistance au
freinage évoquée plus haut. Les études ayant montré
que dans 50 pour cent des collisions entre une voiture
et celle qui précède, il n’y a pas de freinage,
le véhicule prend lui-même l’initiative de réduire la
vitesse. En associant le radar à une caméra, on peut
évaluer le problème avec davantage de précision.
Lorsque tout indique qu’il va y avoir un problème, le
système émet un signal sonore et allume un témoin
lumineux rouge au niveau du pare-brise. Celui-ci doit
déclencher le même réflexe instinctif qu’un stop qui
s’allume devant le conducteur. Simultanément, les
freins sont mis en état d’intervenir rapidement. Et
si le conducteur s’obstine à ne pas réagir, la voiture
freine toute seule. Elle ne s’arrête pas complètement,
car le législateur ne l’autorise pas encore, mais ralentit
suffisamment pour réduire au minimum l’impact
d’une collision inévitable.
Quand les constructeurs auront le feu vert pour
concevoir des voitures capables de décider en toute
indépendance, ce qui est déjà techniquement possible,
nous serons à un tournant. En attendant, il
nous paraît préférable de laisser la décision finale au
conducteur, tout en l’aidant au maximum dans sa
tâche. Cela évitera les embrouillaminis judiciaires qui
pourraient naître en cas de défaillance (réelle ou supposée)
de la technologie de sécurité et de sa capacité
d’estimation.
La sécurité d’abord – grouper les efforts
La sécurité et la prévention des accidents routiers
mortels est naturellement une affaire sans exclusive : il
faut envisager toutes les solutions de sécurité passive
et active, et les mettre en oeuvre en fonction de leur
efficacité. De même, toutes les parties concernées de
près ou de loin par la sécurité routière doivent prendre
leurs responsabilités. L’alcoguard et les systèmes qui
surveillent les mouvements oculaires de l’automobiliste
protègent déjà celui-ci contre lui-même en cas de fatigue
ou de consommation d’alcool. Mais sans une vision
claire de l’infrastructure et de son entretien, sans une
priorité à la formation et à la sensibilisation, la Belgique
ne pourra pas conserver sa place parmi les pays les plus
sûrs d’Europe. Récemment encore, les années de sousinvestissement
dans notre infrastructure routière étaient
pointées du doigt par le gouverneur honoraire de la
Banque Nationale Fons Verplaetse (1).
La sécurité routière en Belgique
Ces dernières années, la Belgique a bien progressé sur le plan de la sécurité routière, mais pour la période 2005-2006,
nous n’arrivons qu’à la dix-huitième place européenne. De 2005 à 2006, le nombre de morts sur les routes n’a baissé
que de 1,8 pour cent dans notre pays. En même temps, en Europe, la baisse moyenne atteignait 5 pour cent. À plus
long terme, la Belgique se comporte mieux. Grâce aux bons résultats de 2001 à 2005, notre pays occupe la sixième
place en termes d’augmentation de la sécurité routière pour la période 2001-2006.
Le contrôle de stabilité électronique (ESC2) surveille la trajectoire de votre voiture
Le système de contrôle de la stabilité aide le conducteur à garder la maîtrise de son véhicule dans les situations
potentiellement dangereuses. Dès que le conducteur évalue mal un virage ou doit éviter un obstacle
imprévu et risque de déraper, le système prend automatiquement des mesures correctives. Quand le détecteur
d’angle de dérapage constate l’existence de ce risque, il fait varier instantanément la force de freinage aux
quatre roues. Au besoin, l’arrivée de carburant au moteur est interrompue jusqu’à ce que le véhicule soit
stabilisé. Le tout en une fraction de seconde, bien moins qu’il n’en faudrait au conducteur le plus affûté.
Le contrôle de stabilité rend aussi de précieux services sur les camions : les situations difficiles propres aux
convois tracteur-remorque – basculement, glissade, mouvement en ciseau – sont automatiquement corrigées,
et dans la plupart des cas évitées.
Le Règlement 13 de l’UNECE organise l’introduction phasée de l’ESC à partir de 2010 sur tous les types de
véhicules, en Europe, aux États-Unis et au Japon. On estime qu’en Europe, l’ESC devrait permettre d’éviter
chaque année 3000 accidents avec décès ou blessés graves.
(1) Knack 16 avril 2008, p. 44-45
(2) L’ESC est aussi appelé Vehicle Dynamic Control, Dynamic Stability Control, Vehicle Stability Control ou Vehicle Stability Assist.